Le Mardi 15 Mai 2018 par Casual Mars
Capture d'écran Le Monde
Paru ce lundi 14 mai sur le site du journal Le Monde, l'ancien capo du Commando Ultra' 84 a accordé une interview alors que cela fait 10 ans qu'il a été condamné après le match contre l'Atlético Madrid. Demain soir, il sera bien évidemment présent avec son groupe de supporters dans le stade de Aulas.
Dix ans se sont écoulés depuis les incidents du match Atlético de Madrid-Olympique de Marseille et la condamnation à trois ans et demi de prison en Espagne, infligée à Santos Mirasierra.
« Je suis devenu un symbole de violence, de hooliganisme, alors que je suis et ai toujours été un simple ultra qui ne veut que soutenir son club. »
En 2008, un soir de Ligue des Champions entre l'Atlético Madrid et l'OM (défaite 2-1 pour nos olympiens) au stade Vicente-Calderon, Santos devient une icône du mouvement ultra. Dans la tribune où nous étions parqués, nous supporters de l'OM, les forces de l'ordre nous ont chargé. Une caméra de surveillance a enregistré le geste de Santos qui pousse un policier dans le dos et le déstabilise.
« Quand j'ai vu des membres du groupe, des femmes, des jeunes, des vieux, se faire matraquer alors qu'ils étaient assis, j'ai réagi. Je pense que tout le monde peut le comprendre », explique-t-il.
Après sa condamnation, pendant deux mois, le Stade Vélodrome reprendra en chœur « Libérez Santos ! » à chaque match de notre Olympique, jusqu'à sa libération sous caution, le 9 décembre 2008. Pape Diouf, alors président de l'OM, affrétera un avion privé pour le rapatrier. Les Bukaneros, supporters du Rayo Vallecano, avanceront la caution.
« Cela ne s'est pas arrêté là. L'Espagne m'a rendu à la France mais n'a jamais lâché sa pression. J'ai fait quatre mois et demi à la maison d'arrêt de Luynes [près d'Aix-en-Provence], puis dix mois de conditionnelle avec un bracelet électronique » rappelle-t-il.
« Depuis que l'on sait que l'OM jouera la finale contre l'Atlético, les journalistes m'appellent. À la télévision, on me présente à nouveau comme un bagarreur. Mais comment ces gens peuvent-ils dire cela, alors qu'ils ne m'ont jamais rencontré ? », s'interroge Santos.
Après sa sortie de prison, l'ancien capo du CU84 s'est mis au football américain. Deux saisons avec les Argonautes d'Aix-en-Provence, une des meilleures équipes françaises, avant une blessure au genou.
« C'est un sport que j'ai toujours rêvé de pratiquer. En cellule, tu fais le point sur tes envies et tu te dis qu'en sortant il faudra aller au bout. Pour moi, c'était aussi une façon de changer de monde. [...] Au début, tu penses que tu vas passer à autre chose, que tu as payé cher ton amour pour l'OM, pour la culture ultra... Mais le stade, quand tu n'as fait que ça, c'est plus fort que toi. »
Pendant les deux ans où il fut interdit de stade, Santos accompagnait parfois ses potes de son groupe jusqu'aux portes du Stade Vélodrome et écoutait la ferveur s'échappant de l'intérieur. « Je suis même allé en déplacement à Nancy avec eux. Là-bas, je me suis installé dans un bar pour regarder la rencontre, seul », raconte-t-il.
Jeudi dernier, pendant que la file d'attente des abonnés ultras pour obtenir leur place pour la finale de l'Europa League s'étirait devant le local et le long du Boulevard Rabatau, Santos recousait la tête de mort du groupe sur une bâche. « Je l'avais retirée avant le déplacement à Bilbao, parce qu'en Espagne tout signe ultra est interdit », explique-t-il.
En 2008, c'est ce blason du Commando Ultra' 84 qui avait déclenché la charge des policiers madrilènes. Symbole de l'incompréhension du mouvement ultra, désormais pris pour cible par les autorités à travers toute l'Europe, à coups d'interdictions de déplacement, de fermetures de tribunes, d'interdictions de stade accompagnées parfois par des peines de prison et de lourdes amendes... et avec dans le même temps, la propagation incessante du football-business voulant remplacer les véritables supporters et défenseurs de leur club par des spectateurs-consommateurs dociles venant au stade comme s'ils se rendaient au cinéma.
« Voir des virages fermés parce qu'il y a eu des fumigènes, ça fait mal. Il n'y a pas de dialogue, que de la répression. Nous ne sommes pas des anges, mais que souhaite-t-on ? Nous chasser des stades ? Je pense qu'à l'OM, le président Eyraud a compris qu'il avait besoin de nous. Contre Leipzig et Salzbourg, si les groupes de supporters ne poussent pas derrière l'équipe, obtient-on le même résultat ? »
À Lyon, Santos sera parmi nous, dans le stade lyonnais, au cœur de son groupe. Comme il l'était à Bilbao en huitièmes de finale, où les caméras de la télévision espagnole l'ont traqué, ou en Autriche pour la demi-finale retour.
« On me demande si cela m'inquiète que l'OM affronte l'Atlético... Je vois juste que mon club dispute une finale de Coupe d'Europe. On craint des affrontements avec les Espagnols ? À Madrid, en 2008, il n'y a pas eu de bagarre entre supporters. C'est la police qui a chargé. Lorsque j'étais en prison, les gars du Frente Atlético, (principal groupe de supporters de l'Atlético Madrid) sont venus me voir, pour me dire qu'ils auraient réagi comme moi. »
Retrouvez en intégralité cet article ici, sur le site du Monde.