Le Dimanche 07 Août 2022 par Yannis
Depuis tout minot, j'ai en mémoire cette image de Didier Deschamps et Alen Boksic allumant un cierge à Notre Dame de la Garde avant de s'envoler pour Munich battre le grand Milan AC un beau soir de Mai 1993. J'ai sans doute pris conscience devant ces images que Marseille, l'OM, la Bonne Mère et la bonne étoile, tout cela était étroitement lié, voire indissociable, et que quand on évoque l'Olympique de Marseille il est plus que nécessaire d'avoir la foi.
« Les aubes ne sont que l'illusion de la beauté du monde. Quand le monde ouvre les yeux, la réalité reprend ses droits, et l'on retrouve le merdier ». C'est par ces mots à la fois durs et plein de sens que le romancier marseillais Jean-Claude Izzo peignait l'âpre quotidien de sa ville, enfant chérie de la méditerranée, Marseille.
En effet, en terre de Phocée tout s'embrase et s'éteint aussi vite qu'une traînée de poudre. C'est le rythme d'une ville où le temps est assassin, où la vérité d'un jour n'est jamais celle du lendemain. Fin Mai, le scénario du match face à Strasbourg (4-0) s'était achevé sur un goût d'apothéose. Sous les yeux ébahis de la jeune génération de supporters qui peuplent nos virages, l'OM arrachait cette seconde place en championnat synonyme de qualification directe pour la plus prestigieuse des Coupes d'Europe. « OM IS BACK ! » assénait alors Frank McCourt. On se rêvait être à l'aube d'une nouvelle aventure.
Soixante jours plus tard, le merdier en coulisse provoqué par le départ de Jorge Sampaoli semble encore palpable. C'est ça l'OM, unique dans son imperfection, comme condamné au chantier perpétuel et permanent. À l'image de Marseille, maintes fois détruite puis reconstruite.
On dit parfois que les saisons réussies se construisent durant l'intersaison. Si c'est le cas, les dernières semaines agitées de notre club ont de quoi entretenir un certain scepticisme dans nos cœurs de supporters. La continuité ne fait pas partie du vocabulaire olympien. Pablo Longoria assume même une rupture avec le style de jeu Sampaoliste.
Un nouveau coach, un tout nouveau projet de jeu, une nouvelle assise défensive, mais aussi de nouveaux renforts intéressants et autant de promesses à confirmer. Un choix risqué. Une nouvelle année zéro au moment de retrouver le gratin continental. Un pari pour le moins audacieux au sortir d'une préparation estivale lourde et éreintante, et à l'entame d'une saison au calendrier chargé, qui devrait laisser peu de temps pour travailler. On le sait, la C1 use psychiquement et physiquement les organismes, et seules les victoires permettront d'évacuer rapidement la fatigue et naviguer sereinement.
Mais cette saison encore, plus de quarante deux milles abonnés garniront l'enceinte du boulevard Michelet. Un univers de fièvre insaisissable animé d'une foi inébranlable. Preuve que l'OM, comme je ne me lasserais jamais de l'écrire, est bien plus qu'un simple club de football. L'OM, c'est d'abord une passion en héritage. L'OM, c'est bien souvent un coup de foudre. L'OM, c'est savoir transmettre. L'OM, c'est savoir partager. L'OM, ce sont les souvenirs des anciens. L'OM, ce sont les rêves de nos minots. L'OM, c'est notre totem, le soleil de nos vies de misère.
Aussi, quand on préside aux destinées d'un club comme le nôtre, c'est pour l'amener tout en haut et rien d'autre. Gageons que nos dirigeants en aient pleinement conscience.
Dominant la cité phocéenne du haut de ses cent cinquante-cinq mètres d'altitude, la Bonne Mère est un des rares lieux saints partagés. Il n'est pas rare d'y croiser des croyants de différentes religions. Notre Dame de la Garde est semblable au Stade Vélodrome, un véritable lieu de pèlerinage, dans lequel, le temps d'un match, toutes nos barrières tombent, qu'elles soient sociales, culturelles, ou ethniques.
« Le football offre différentes visions sur une même réalité » avance Marcelo Bielsa. Confiants, inquiets, incertains ou impatients, faisant fi des différences, l'esprit marseillais a cette faculté à mettre en lumière ce qui nous rassemble. En l'occurrence, ces couleurs, ce maillot et sa capacité à être un fantastique vecteur de cohésion sociale. Marseille, capitale des vents, du soleil et de la mer, n'a de plus fidèle reflet, de plus belle allégorie et de plus grande richesse que son club de football. « Cette ville est une immense respiration » écrivait le journaliste Robert Bouvier. Son stade et son peuple en sont le cœur.
Gardons la foi.
Aux absents.
Yannis
@B_Yannis_