Actualité
Benfica Lisbonne 1-0 OM
Estadio da Loose - La légende de l'OM (2/30)
Le Lundi 30 Avril 2012 par Bab Joo
Ce 18 avril 1990, l'hiver se prolonge interminablement en Franche-Comté. A Besançon, le thermomètre affiche des valeurs négatives. Il caille sec, et j'adorerais aller me faire dorer la pilule sur une plage... au Portugal, par exemple.
Mais voilà, les vacances de Pâques sont presque finies et un gros bac blanc attend l'adolescente que je suis encore à la rentrée : tout en me replongeant en soupirant dans mes fiches de sciences éco, je me dis que les supporters marseillais qui ont fait le déplacement à Lisbonne ont bien de la chance. A en juger à la façon dont ils ont été reçus et l'ambiance dans et autour du Estadio de la Luz, c'est pas forcément leur avis...
Parce qu'avec les copains, évidemment, on ne parle que de ça. De la possible qualification des Olympiens en Finale de la Coupe d'Europe des Clubs Champions. Même pour ceux qui ne s'intéressent guère au foot ou qui ne sont pas des supporters enthousiastes de l'Olympique de Marseille, c'est un petit événement, parce que les clubs français ont rarement l'occasion de s'illustrer dans les phases finales des coupes européennes, et en particulier dans la plus prestigieuse d'entre elles.
Mais dès son arrivée en 1986, Bernard Tapie a imposé sa griffe : même ceux pour qui le foot est un genre de terra incognita ne peuvent ignorer que quelque chose est en train de frémir du côté de la Canebière.
Puis Besançon est la première ville "pro-marseillaise" hors PACA, et il est à peu près impossible d'ignorer l'événement : tous les bistrots du coin arborent les couleurs Blanc et Azur, et les boutiques d'articles de sport se frottent les mimines.
Cependant, aucune chance de convaincre ma famille de me laisser regarder le match : il n'y a qu'une seule télé dans la maison et elle est à l'usage quasi exclusif de ma mère, qui, pétrie de certitudes définitives, n'a jamais compris que je puisse m'intéresser au sport d'une façon générale, et au foot en particulier : "Le foot, c'est pas pour les filles". Oui maman. Comme les maths ou le heavy-metal. Qu'à cela ne tienne, j'irai réviser mes maths et écouter du heavy metal chez mon copain qui présente, en la circonstance, le triple avantage d'être un brillant matheux, un gratteux fou, et un ultra-footeux !
C'est un match sans gros enjeu, la qualification est quasiment assurée : même si l'OM dispose d'une marge de manoeuvre assez réduite, elle n'a pas grand chose à redouter d'un adversaire qui peut, au mieux, espérer le nul sur son propre terrain. Mais Gérard Gili aligne exactement la même composition qu'au match aller (OM 2-1 Benfica): après tout, on ne change pas une équipe qui gagne ! Même quand elle vendange beaucoup, elle est l'une des plus belles que l'OM ait jamais compté !
Un horaire si inhabituel que les tévés européennes qui retransmettaient la rencontre n'avaient pas eu beaoin de bouleverser leurs programmes : c'est donc avec un oeil sur la Sacrée Soirée du Marseillais pur jus Jean-Pierre Foucault que, la bande de chevelus et moi, on enfourne nos vieux bouts de pizza surgelée.
Le match en lui-même ? Pas beaucoup d'intensité et relativement peu d'occasions de part et d'autre. Presque ennuyeux. Les Portugais poussent un peu, mais pas trop. Les Provençaux déjouent mais résistent, sans vraiment forcer. Il reste dix minutes à jouer, c'est plié. Pour la première fois de son existence, le club phocéen tient sa qualif' pour une finale européenne.
On débouche deux-trois bières, à peu près indifférents à ce qui se passe désormais sur le terrain. On pousse un peu la sono, on organise un concours de headbanging. Le hurlement de Jean-Michel Larqué nous fait sursauter. Comment a-t-il réussi à couvrir les feulements gutturaux de Tom Araya ?
On est à la 83ème minute. Benfica vient d'ouvrir le score. Sur un corner, Magnusson détourne de la tête pour son coéquipier, l' Angolais Vata Matanu Garcia, entré à la 52ème en remplacement du buteur du match aller. Pour Vata ? Non : pour sa main ! On n'a même pas vu le but ! un ralenti, deux ralentis, trois ralentis... hébétés, on se demande si on n'a pas péché par optimisme en invoquant un poil trop tôt les Dieux du Thrash-metal.
Monsieur Van Langhenove ! La main de Vata ! La main du Diable ! Elle est manifeste, elle est évidente ! Comment pouvez-vous valider ce but ?
Dans la chambre de bonne, ce n'est plus que vociférations relatives aux préférences sexuelles de l'arbitre. Mais l'homme en noir n'a que faire de notre indignation, de l'indignation des joueurs, de l'indignation des commentateurs, de l'indignation de tout un peuple qui comprend soudain qu'il vient de se faire v(i)oler. Il assume pleinement sa décision, qui donnera les clés de la qualif' aux Lisboètes et amènera Bernard Tapie à la conclusion suivante : "Maintenant, je sais comment on gagne une Coupe d'Europe" !
Minuit. Je rentre chez moi. J'ai froid. J'ai oublié mon cours de maths chez mon copain. Soirée de merde. Et pourtant... pourtant, cette soirée là est celle d'un commencement.
Avant, j'aimais bien l'OM. Ce soir-là, j'en suis tombée amoureuse. J'ai toujours eu un faible pour les causes perdues...
Mais voilà, les vacances de Pâques sont presque finies et un gros bac blanc attend l'adolescente que je suis encore à la rentrée : tout en me replongeant en soupirant dans mes fiches de sciences éco, je me dis que les supporters marseillais qui ont fait le déplacement à Lisbonne ont bien de la chance. A en juger à la façon dont ils ont été reçus et l'ambiance dans et autour du Estadio de la Luz, c'est pas forcément leur avis...
Parce qu'avec les copains, évidemment, on ne parle que de ça. De la possible qualification des Olympiens en Finale de la Coupe d'Europe des Clubs Champions. Même pour ceux qui ne s'intéressent guère au foot ou qui ne sont pas des supporters enthousiastes de l'Olympique de Marseille, c'est un petit événement, parce que les clubs français ont rarement l'occasion de s'illustrer dans les phases finales des coupes européennes, et en particulier dans la plus prestigieuse d'entre elles.
Mais dès son arrivée en 1986, Bernard Tapie a imposé sa griffe : même ceux pour qui le foot est un genre de terra incognita ne peuvent ignorer que quelque chose est en train de frémir du côté de la Canebière.
Puis Besançon est la première ville "pro-marseillaise" hors PACA, et il est à peu près impossible d'ignorer l'événement : tous les bistrots du coin arborent les couleurs Blanc et Azur, et les boutiques d'articles de sport se frottent les mimines.
Cependant, aucune chance de convaincre ma famille de me laisser regarder le match : il n'y a qu'une seule télé dans la maison et elle est à l'usage quasi exclusif de ma mère, qui, pétrie de certitudes définitives, n'a jamais compris que je puisse m'intéresser au sport d'une façon générale, et au foot en particulier : "Le foot, c'est pas pour les filles". Oui maman. Comme les maths ou le heavy-metal. Qu'à cela ne tienne, j'irai réviser mes maths et écouter du heavy metal chez mon copain qui présente, en la circonstance, le triple avantage d'être un brillant matheux, un gratteux fou, et un ultra-footeux !
C'est un match sans gros enjeu, la qualification est quasiment assurée : même si l'OM dispose d'une marge de manoeuvre assez réduite, elle n'a pas grand chose à redouter d'un adversaire qui peut, au mieux, espérer le nul sur son propre terrain. Mais Gérard Gili aligne exactement la même composition qu'au match aller (OM 2-1 Benfica): après tout, on ne change pas une équipe qui gagne ! Même quand elle vendange beaucoup, elle est l'une des plus belles que l'OM ait jamais compté !
Un horaire si inhabituel que les tévés européennes qui retransmettaient la rencontre n'avaient pas eu beaoin de bouleverser leurs programmes : c'est donc avec un oeil sur la Sacrée Soirée du Marseillais pur jus Jean-Pierre Foucault que, la bande de chevelus et moi, on enfourne nos vieux bouts de pizza surgelée.
Le match en lui-même ? Pas beaucoup d'intensité et relativement peu d'occasions de part et d'autre. Presque ennuyeux. Les Portugais poussent un peu, mais pas trop. Les Provençaux déjouent mais résistent, sans vraiment forcer. Il reste dix minutes à jouer, c'est plié. Pour la première fois de son existence, le club phocéen tient sa qualif' pour une finale européenne.
On débouche deux-trois bières, à peu près indifférents à ce qui se passe désormais sur le terrain. On pousse un peu la sono, on organise un concours de headbanging. Le hurlement de Jean-Michel Larqué nous fait sursauter. Comment a-t-il réussi à couvrir les feulements gutturaux de Tom Araya ?
On est à la 83ème minute. Benfica vient d'ouvrir le score. Sur un corner, Magnusson détourne de la tête pour son coéquipier, l' Angolais Vata Matanu Garcia, entré à la 52ème en remplacement du buteur du match aller. Pour Vata ? Non : pour sa main ! On n'a même pas vu le but ! un ralenti, deux ralentis, trois ralentis... hébétés, on se demande si on n'a pas péché par optimisme en invoquant un poil trop tôt les Dieux du Thrash-metal.
Monsieur Van Langhenove ! La main de Vata ! La main du Diable ! Elle est manifeste, elle est évidente ! Comment pouvez-vous valider ce but ?
Dans la chambre de bonne, ce n'est plus que vociférations relatives aux préférences sexuelles de l'arbitre. Mais l'homme en noir n'a que faire de notre indignation, de l'indignation des joueurs, de l'indignation des commentateurs, de l'indignation de tout un peuple qui comprend soudain qu'il vient de se faire v(i)oler. Il assume pleinement sa décision, qui donnera les clés de la qualif' aux Lisboètes et amènera Bernard Tapie à la conclusion suivante : "Maintenant, je sais comment on gagne une Coupe d'Europe" !
Minuit. Je rentre chez moi. J'ai froid. J'ai oublié mon cours de maths chez mon copain. Soirée de merde. Et pourtant... pourtant, cette soirée là est celle d'un commencement.
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