De Flamini à Kamara, la symphonie des ingrats (27/05/2022)

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De Flamini à Kamara, la symphonie des ingrats

Le Vendredi 27 Mai 2022 par Le Corbeau phocéen

Olympique de Marseille

Nouvel édito du Corbeau Phocéen, cette fois-ci au sujet de plusieurs minots formés à l'OM et partis sans laisser aucune indemnité de transfert au club de la ville qui les a vu naître.

Dimanche 9 mai 2004. L'émission Téléfoot, qui me censurera plus tard à la demande de Vincent Labrune et portera ainsi atteinte à ma personne et à ma carrière, célèbre la qualification de l'OM acquise face à Newcastle en finale d'Europa League. On y voit Mathieu Flamini apparaître à l'écran, d'abord après le match en train de sabrer le champagne avec ses coéquipiers dans les vestiaires. Puis le lendemain dans sa voiture, lunettes de soleil noires et tout sourire malgré les embouteillages dans Marseille. Il promets « J'ai toujours joué à l'OM, depuis tout petit. J'espère signer mon contrat pro à l'Olympique de Marseille ». Titulariser son minot en Coupe d'Europe et l'afficher jusqu'en finale aux yeux des autres clubs avec un contrat stagiaire, seuls les dirigeants et l'entraîneur de l'OM de l'époque pouvaient le faire. Une sacrée marque de confiance, trahie par un Flamini qui évoquera son départ cinq ans plus tard en ces termes « La vérité c'est qu'eux n'ont pas cru en moi ». Dans le jargon, quitter un club libre à qui l'on doit formation et exposition soudaine sans rien laisser derrière soi, même pour Arsenal et 18 ans plus tard, cela s'appelle toujours "faire une Flamini".

Plusieurs années après, en juin 2015, c'est l'autre minot André Ayew qui se prête au jeu des départs libres. Il marquait sèchement le 8 mai 2015 d'un « vous baisseriez votre salaire vous? » son refus de prolonger à l'OM, auprès de journalistes qui lui posaient des questions sur sa fin de contrat très proche et les moyens de faciliter sa prolongation. Rappelons qu'à ce moment précis, il est déjà le deuxième salaire le plus important du club, avec près de 4 millions d'euros de salaire annuel. Le même salaire important et la même carrière que lui avait offert l'OM jusqu'à présent, après cinq ans pleins passés au club en professionnel. Là aussi, l'OM n'avait sans doute pas été assez confiant ou reconnaissant envers lui. En guise de remerciements, des larmes de crocodile, un départ libre chez l'ogre anglais de Swansea et 8 millions d'euros de prime à la signature qui iront directement dans sa poche. En difficulté financièrement, l'OM aurait pourtant eu besoin d'un joueur qui sait rendre la pareille à un moment critique. 

Que dire du « Si je reste à l'OM, je me perds » de Bilal Boutobba en mars 2015, au club depuis les poussins, lancé contre toute attente par Marcelo Bielsa à l'âge de 16 ans, 3 mois et 6 jours à l'occasion d'un match de Ligue 1 contre Monaco. Il s'agit alors du plus jeune joueur de l'histoire de l'OM en match officiel. Suite à son refus, l'équipe B de Séville, Montpellier où il ne jouera que 3 matchs en pro en deux ans puis les Chamois Niortais en Ligue 2. La vraie définition de se perdre, preuve surtout que l'herbe est rarement plus verte ailleurs qu'à l'OM pour les minots. Boutobba un gaucher rapide, perforateur et prometteur, un peu comme un certain Isaac Lihadji. Le 14 juillet 2019, à l'aube de la nouvelle saison pour l'OM, Florian Thauvin se blesse en amical face aux Glasgow Rangers. Un boulevard sportif s'ouvre pour le minot du Parc Kalliste alors âgé de 17 ans, qui joue précisément au même poste d'ailier droit en faux pied que Thauvin. Pour l'OM, il est hors de question qu'il joue sans signer. Peu importe pour lui et ses agents, qui préfèreront qu'il se morfonde toute la saison en réserve. Malgré cette opportunité de jouer en or, notamment en C1, ils préféreront repousser toutes les propositions de prolongation. La preuve que quand il est question pour un minot et son entourage de faire un enfant dans le dos de l'OM, il est rarement question de sport. Et que le choix des chiffres sur le compte bancaire n'est pas toujours le bon à plus long terme. Ou comment passer de rois chez eux à valets ailleurs. « Le projet, les supporters m'ont attiré. Je sais que c'est un club qui met les jeunes en valeur » disait Lihadji, avec un certain sens de l'humour quand on connait la suite, lors de sa présentation au LOSC. Deux saisons après sa signature dans le nord, il n'a même pas disputé la moitié des matchs de son équipe, la plupart du temps pour faire de la figuration quelques minutes et en sortie de banc. Indirectement, c'est l'OM qui était visé au moment de son départ, sans doute pour se donner meilleure conscience. Vouloir se rassurer sur son choix de quitter le restaurant sans payer l'addition, son point commun avec Boubacar Kamara. « Quand le mensonge prend l'ascenseur, la vérité prend l'escalier » disait dernièrement le minot des quartiers sud sur Twitter, soudainement philosophe, après son récent départ à Aston Villa. Il l'était beaucoup moins avec son simple « merci pour tout » sur Instagram suite à OM-Strasbourg avant la diffusion d'une interview insipide, là aussi dans Téléfoot, pour confirmer sa décision de ne pas prolonger à l'OM, sans un mot pour le club ou les supporters olympiens. Avant de se faire totalement reprendre de volée suite à cette annonce. Comment imaginer un seul instant quitter le club le plus populaire de France de cette manière sans des retombées. Surtout au moment d'être sélectionné en Équipe de France et alors que l'OM jouera la Ligue des Champions, pour rejoindre le 14ème de Premier League.

Pour finir sur une meilleure note, au rayon des points positifs, impossible de ne pas citer Mehdi Benatia, ex-capitaine de la CFA de l'OM qui voulait prolonger mais qui dira n'avoir « pas eu le bon agent » pour le directeur sportif de l'OM, à une époque que l'on aimerait oublier. Mais surtout Samir Nasri, qui aurait pu partir libre de l'OM mais qui avait préféré prolonger avant de rejoindre Arsenal, pour que son club touche une indemnité de transfert. Un geste loué jusqu'à aujourd'hui et que personne n'a oublié à l'OM. Et enfin Maxime Lopez, que Longoria remerciera pour sa prolongation afin de ne pas partir gratuitement, avant son transfert à Sassuolo. Pour ce dernier, qui a une bonne côte en Italie, l'OM possède d'ailleurs un pourcentage sur une revente future, qui pourrait rapporter de l'argent à son club formateur. Preuve que tout n'est pas noir et que certains minots savent ce qu'ils doivent au club qui a fait d'eux ce qu'ils sont devenus.

Pour conclure et pour paraphraser Kamara, dans le cas d'un départ libre de l'OM des minots, si le salaire et la prime à la signature ont sans doute pris l'ascenseur, la carrière prendra l'escalier. Et au moment de la juger, beaucoup se rappelleront de ce marqueur d'ingratitude indélébile. De tous les minots qui ont quitté le club de cette manière les deux dernières décennies, tous l'ont fait pour des clubs de moindre envergure que l'OM et ont vu leur carrière péricliter. Quand ce choix s'est avéré plutôt payant sur le plan sportif comme pour l'unique Flamini, ça l'a été beaucoup moins en termes d'image.

Même si pour justifier leur départ sans aucune reconnaissance, eux et leur entourage sauront toujours au début jouer parfaitement la symphonie des ingrats.